De nombreuses questions ne faisaient que se bousculer dans l’esprit de Charlotte depuis qu’elle avait découvert sa grossesse. Elle n’en avait pas encore parlé à Dario, pas parce qu’il n’était pas le père de l’enfant, non, c’était impossible, mais parce qu’elle avait peur de sa réaction, et de la décision qu’ils allaient prendre, face à tout cela. Il était clair que tous les deux ne roulaient pas sur l’or, surtout depuis que la brune avait coupée tout contact avec ses parents sans même se retourner, comme elle avait toujours désiré le faire, et qu’elle avait abandonnée son métier qui lui rapportait bien plus que celui qu’elle pratiquait aujourd’hui. Et elle n’avait aucun regret à ce niveau-là. Même si la jeune femme avait grandi dans la richesse et avait été éduquée pour aimer les bonnes choses, le matériel ne restait que secondaire à ses yeux. Tout ce qui comptait pour elle était d’être avec la personne qu’elle aimait. Mais élevé un enfant alors qu’ils avaient déjà du mal à joindre les deux bouts ? Il était normal que la peur la prenne au ventre.

Ça ne l’empêchait tout de même pas d’être curieuse et attirée par cette vie. D’avoir cette envie de devenir mère, et de tenter le coup malgré tout même si elle ne savait pas où tout cela allait bien pouvoir les mener. Et en passant devant cette école maternelle, en voyant tous ces petits enfants courir partout, contents d’être ensemble et de pouvoir s’amuser, elle n’avait pas pu s’empêcher de s’arrêter quelques minutes pour les observer. Elle les enviait, et elle se demandait si son enfant serait aussi heureux que cela s’ils prenaient la décision de le garder. Si lui aussi allait un jour courir dans cette cour avec ses copains et râler un peu pour la forme quand elle viendrait le chercher à la fin de la journée. Le fil de ses pensées fut cependant interrompu par une voix qui l’interpelait. Elle releva alors les yeux vers une femme, se rendant compte que son comportement pouvait paraître un peu suspect, la mettant soudain mal à l’aise.

« Bonjour, je… Non, c’est gentil je vous remercie, je voulais juste… »

Tu voulais juste quoi, Charlotte ? Elle secoua la tête, encore plus embarassée qu’elle ne l’était au départ, un sourire fort mal à l’aise scotché au visage.

« J’ai… Appris récement que j’étais enceinte et, en passant devant l’école… »

Ça l’a fait devenir un peu dingue, et lui a retiré l’usage de la parole, visiblement. En fait, elle-même ne savait pas vraiment pourquoi elle s’était arrêtée pour observer les enfants. Est-ce que c’était parce que son esprit voulait lui faire passer un message, et lui faire comprendre qu’elle devait garder le sien ? Elle n’en savait rien, et ne s’en retrouvait qu’encore plus confuse.

C’était voir le monde d’une autre façon quand on attendait un enfant. Il y a quelques semaines, la seule chose qui préoccupait l’esprit de Charlotte était que sa famille ne la retrouve, et la force à rentrer chez elle pour épouser cet homme qu’elle n’aimait pas et qu’elle n’aimerait jamais alors que maintenant… Ça lui semblait si futile tout ça. Et elle avait clairement le meilleur des arguments en sa possession pour ne plus rentrer chez elle. Cet homme ne voudrait plus l’épouser quand il apprendrait qu’elle était enceinte d’un autre, et ça aurait même pu être le plan parfait, alors qu’en réalité elle n’avait rien programmée du tout. C’était arrivé comme ça, sans qu’aucun des deux ne le veuilles. Et maintenant elle se retrouver devant une école, à regarder des enfants jouer, et à discuter avec une institutrice comme si elle avait accepté la chose. Alors que ce n’était pas le cas, sinon elle en aurait déjà parlée à Dario. Elle avait encore besoin d’un peu de temps, même si elle en manquait, parce que bientôt sa grossesse serait visible.

« Merci. »

Les félicitations, elle avait l’impression que c’était un peu le truc que tout le monde disait quand ils apprenaient une bonne nouvelle dans la vie de quelqu’un d’autre. Félicitations pour vos fiançailles félicitations pour le futur bébé, félicitations pour ton diplôme. Dans sa tête ça finissait par sonner hypocrite à force, au vu du nombre de fois où elle l’avait entendu sortant de la bouche de personnes malhonnêtes.

« Je me doute bien, oui. »

Heureusement qu’elle avait encore quelques années. Elle ne se voyait pas accoucher d’un enfant qui savait déjà parler et marcher. Déjà que sans ça ce ne serait certainement pas facile à gérer au début… Une chose à la fois. Et puis le bruit, elle y était habituée. Travailler dans l’industrie du spectacle lui donnait très rarement des moments de calmes, et ce n’était pas forcément une chose qui la dérangeait. Elle aimait quand ça vivait autour d’elle, et pour cela, il fallait forcément un minimum de bruit.

« Seulement quelques semaines, je l’ai appris très récemment. »

Et en réalité, elle ne savait même pas depuis combien de temps elle portait son enfant, exactement. Elle n’avait pas encore fait sa première échographie, parce qu’elle voulait justement en parler à Dario avant, et qu’il l’accompagne aussi. Elle ne se voyait pas affronter ça toute seule, en réalité. Ça lui faisait un peu peur, même si elle ne savait pas vraiment pourquoi elle avait peur.

Des doutes, elle en avait, énormément. Elle ne savait même pas encore si elle allait garder ce bébé ou non. Est-ce que c’était vraiment raisonnable ? ils ne roulaient pas sur l’or avec Dario, même s’ils n’étaient pas non plus à la rue. Mais le fait qu’elle s’arrête de travailler pour le bébé risquait de leur poser problème. Et une fois qu’il serait là et bien… Elle devrait reprendre le travail parce qu’elle n’aurait pas le choix, ils en auraient besoin. Ça allait être difficile, elle en avait bien conscience, et c’était bien ça qui lui faisait peur, malgré qu’une autre part d’elle-même voulait ce bébé peu importe les risques qu’elle devait prendre. C’était compliqué, c’était une situation délicate, et se poser des questions était certainement plus que normal. Enfin, autant dire qu’elle n’était clairement pas encore habituée aux félicitations, ou à quoique ce soit dans le même genre, vu que personne n’était au courant encore. Mis à part elle, et maintenant cette institutrice de maternelle.

« Oui, c’est pas tellement le cas pour l’instant. »

Elle subissait plus qu’autre chose, à vraie dire. Les nausées, la fatigue, les vomissements, les douleurs. Le premier trimestre semblait être une véritable torture intérieure pour elle, et elle espérait clairement que ça s’arrangerait plus tard. Enfin, si elle gardait le bébé s’entend. Cette décision n’était pas encore prise. Et venir devant une école n’était peut-être pas la meilleure des idées pour prendre une décision rationnelle face à la situation. Là c’était plus son cœur qui allait parler qu’autre chose, non ? Oui, certainement. Qu’est-ce qu’elle fichait ici, nom de dieu ?

« Quelles genre de choses ? »

Ce n’était pas elle qui avait lancée le sujet mais maintenant que c’était fait… Si elle pouvait déjà savoir où aller en cas de besoin, ce n’était pas plus mal. Et ils auraient certainement besoin d’aider le jour où ils auraient un enfant, que ce soit maintenant ou plus tard. On avait pas élevée Charly pour qu’elle devienne mère après tout, bien au contraire même. Elle-même avait été pratiquement élevée par les nourisses de la maison quand elle était petite. Les bébés et les enfants, elle ne savait pas comment s’y prendre, et se sentait totalement perdue.